Je me souviens...

"Je me souviens de Mai 68"
LEMONDE.FR | 06.05.08

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Je me souviens, un soir de début mai 68 en revenant de mon travail à la Thomson dans le XXème, je sortais du métro et montais la rue de la Montagne Ste Geneviève où j'habitais.
En traversant le Bld St Germain je trouve des voitures renversées, la chaussée dépavée, tout ceci dans un calme absolu...que s'est il passé dans l'après-midi ?
J'apprendrais par la radio qu'une manifestation d'étudiants avaient eu lieu, c'est plus qu'une manif., ce que j'ai vu est le théâtre d'une émeute !

Très rapidement l'usine Thomson s'est mise en grève et le 11 Mai au soir je suis allée voir ce qui se passait rue Gay-Lussac. Dépavage, confection de barricade avec des pavés et voitures renversées. Charges des CRS, je rentre vite me mettre à l'abri! Cette nuit là a été terrible, de nombreux blessés...il n'était pas facile de rentrer chez soi, habitant au milieu du théatre des opérations je devais le plus souvent faire des détours pour éviter les barrages de CRS.

Les jours suivants je me joins aux manifestants.
J'apprends le "pas mao" hop! hop! hop! on trottine et la manif se déplace rapidement. La bourse en feu ! mais le chemin vers l'Elysée bloqué, on revient au quartier latin.

Un jour en mai dans l'après-midi, je vois plusieurs CRS matraquant un homme à terre qui semble vraiment mal en point. Je lance "arrêter vous allez le tuer" ils se retournent menaçant, "et toi tu veux y passer aussi !" je n'ai pas demandé mon reste.
Sur le boulevard des petits groupes discutent...

Je me souviens de l'Odéon, théâtre comble, un orateur (un prof vraisemblablement) tenais un discours intéressant sur la démocratie et brusquement la salle a été plongée dans le noir. L'orateur tenait si bien son auditoire que la coupure de courant qui a duré quelques minutes est passée comme si elle n'avait pas existé.
Participation à de multiples discussion, à des tables ronde dans les locaux de censier pour repenser la société...

Et puis je me souviens d'avoir été arrêtée préventivement à une manif qui devait avoir lieu aux halles. Même un homme d'une quarantaine d'année revenant de la FNAC est embarqué.
En cabane à Beaujon une partie de la nuit , relevé de l'identité.

Autre arrestation en Juin, prise dans un petit square Bld St Germain, dans le nuage des gaz lacrymogènes...je me rends, ne réussissant pas à escalader les grilles hautes du square. Dans le car, un CRS de petite taille, tape sur toutes les têtes qui dépassent, il veut nous fusiller, il a pété un plomb! ses collègues le calment.

Je me souviens du "miracle des pompes" il faisait si beau fin mai et pour la pentecôte le gouvernement s'arrange pour approvisionner les pompes à essence.
Les parisiens sont parti à la campagne, c'était la démobilisation et le commencement de la fin.

La chienlit était vaincue et "l'ordre établi" rétabli!
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